Avec la volonté de sortir du nucléaire en 2025, la Belgique propose plusieurs solutions à ses habitants, dont des subventions et plusieurs programmes de soutien pour l’achat de panneaux photovoltaïques à usage résidentiel.
LA BELGIQUE INCITE SES HABITANTS À ÊTRE ALIMENTÉS PAR LE SOLEIL
Le marché photovoltaïque belge a connu le plus haut niveau d’activité de ces six dernières années. En 2019, même si cela peut sembler difficile à croire, il y a eu beaucoup de jours ensoleillés en Belgique, et cela, combiné à la croissance du nombre de panneaux solaires installés, a conduit à une augmentation de 6% de la production d’électricité photovoltaïque au cours des six premiers mois de l’année. (source: APeRE1 & L’Écho2)
Figue 1 : équivalent de panneau solaire pour chaque habitant par région en Belgique. Source : Scénarios de conception stratégique
Le photovoltaïque couvre 9% de la consommation des logements belges. 88% de la capacité installée est située en Flandre (1 panneau par habitant), 12% en Wallonie (1 panneau pour 4 habitants). La plus petite Région et capitale urbaine, la Région de Bruxelles-Capitale est à la traîne (1 panneau pour 34 habitants). Au niveau national, la Belgique se situe dans le haut du classement européen, selon Renouvelle3, une revue belge sur l’énergie durable.
UNE BONNE VOLONTÉ QUI FAVORISE LES COMMUNAUTÉS ÉNERGÉTIQUES MAIS QUI A AUSSI UN FAILLE…
Si ces incitations et cette bonne volonté peuvent sembler inoffensives et respectueuses de l’environnement, elles cachent une préoccupation inattendue : l’utilisation à proprement parlé de l’énergie produite.
En Belgique, comme dans de nombreux autres pays européens, les citoyens ont souvent l’habitude d’utiliser leurs machines à laver et autres appareils électriques énergivores le soir, en raison du tarif plus avantageux. Et même si certaines personnes ont installé des panneaux photovoltaïques, elles n’ont pas encore changé ces vieilles habitudes et nous savons tous que les habitudes sont difficiles à changer parce que, et bien, ce sont des habitudes. Mais, avec la nouvelle politique de taxe sur la consommation (mise en œuvre pour renforcer l’utilisation de l’énergie produite localement), cette résistance va non seulement les empêcher d’utiliser la production abondante de leurs panneaux photovoltaïques tout au long de la journée, mais elle va aussi leur coûter de l’argent puisqu’ils vont devoir payer des taxes pour l’énergie qu’ils n’utilisent pas et qu’ils injectent au contraire dans le réseau national. Un scénario d’élaboration des politiques qui se traduit par une importante perte de motivation et de confiance des citoyens envers le gouvernement belge.
Nous, à Strategic Design Scenarios, en faisons l’expérience directe dans un projet appelé GAC5, Gestion Active de la Consommation. Nous expérimentons, à l’échelle d’un quartier, comment ses habitants peuvent gérer de manière collaborative leur production et leur consommation d’énergie photovoltaïque au moyen d’une application co-créée par 49 ménages volontaires appartenant au quartier.
Ce projet GAC montre comment le design est appliqué pour transformer les comportements de consommation d’énergie. L’équipe a fait une observation ethnologique des pratiques quotidiennes de 40 ménages, puis a cocréé des solutions qui pourraient aider à modifier certaines de leurs pratiques par le biais d’une application. L’objectif principal de cette application est d’agir comme un médiateur entre le régulateur d’énergie et les appareils électriques de la maison en empêchant leur activation pendant les heures de pointe et en les activant plutôt aux heures optimales de la journée (lorsque le soleil brille et que l’énergie produite par les panneaux photovoltaïques locaux est abondante).
Dès nos premières rencontres avec certains des ménages, nous avons réalisé à quel point ces nouveaux concepts d’autoconsommation collective ou de Communautés Énergétiques sont rassurants pour eux. Car en en faisant partie, ils n’ont pas à considérer leur surplus d’énergie comme un gaspillage coûteux.
Les Communautés d’énergie sont actuellement testées dans toute la Belgique pour éviter les pertes d’énergie et permettre aux personnes équipées de panneaux photovoltaïques de partager l’électricité en trop produite sur leurs toits à un tarif préférentiel pour les voisins qui ne possèdent pas de panneaux photovoltaïques. Ainsi, l’électricité est produite, partagée et consommée localement.
DES SUPER-VOISINS POUR ATTÉNUER ENSEMBLE LES PERTES D’ÉNERGIE
Les Communautés Énergétiques et l’autoconsommation collective ne se limitent pas aux seules zones de propriété résidentielle. De nombreuses communautés énergétiques qui incluent d’autres sortes d’organisations sont possibles. Par exemple, en novembre 2019, deux projets pilotes d’autoconsommation collective ont été lancés à Ganshoren et Forest à Bruxelles, où les résidents locaux pourront bénéficier de l’électricité produite par les panneaux solaires de deux écoles à un prix équitable.
Pendant le week-end et les vacances, les deux écoles6 récoltent beaucoup d’énergie avec leurs panneaux solaires, mais comme il n’y a pas d’activités dans les écoles pendant cette période et qu’il n’y a pas de batteries disponibles pour le stockage à long terme de l’énergie solaire, le surplus d’énergie produit est toujours perdu. Cependant, si l’excédent d’énergie est redistribué immédiatement, il peut répondre aux besoins énergétiques des habitants du quartier. Par conséquent, les partenaires7 qui dirigent les deux projets pilotes, expérimentent comment le partage de l’énergie peut être mis en œuvre entre les écoles et les résidents du quartier avec l’aide de médiateurs tels que les promoteurs d’énergie renouvelable, les régulateurs d’énergie et les distributeurs.
L’objectif de ces projets pilotes est d’expérimenter puis de définir, à un stade ultérieur, le cadre structurel et réglementaire qui permettra de développer les communautés énergétiques dans la Région de Bruxelles-Capitale.
École Saint-Augustin à Forest, Bruxelles.Source: www.sunforschools.be
En conclusion, le concept de Communautés Énergétiques est un concept prometteur et en plein essor qui montre déjà les différents types de collaboration que nous pouvons envisager de construire. Il montre également qu’au-delà de la rhétorique de la pauvreté énergétique et du changement climatique, de plus en plus de personnes veulent agir et des projets comme ceux-ci et GAC transforment des idées innovantes en alternatives concrètes et durables pour une transition énergétique abordable et accessible à tous.
.
.
.
Notes:
1 www.apere.org
3 www.renouvelle.be/fr/statistiques/le-photovoltaique-en-2018-marche-relance-production-record
5 GAC est un projet financé par la Région Wallonne et a un consortium de 5 partenaires : Greenwatch, Arewal, IGEAT – ULB, Cetic and Haulogy. Strategic Design Scenarios sous-traitant de l’ULB chargé de travailler sur le design du service et de l’interface de la plateforme. Si vous souhaitez en savoir plus sur le projet, visitez notre site web: www.strategicdesignscenarios.net/gestion-active-des-consommations-gac/
6 Les deux écoles qui participent à un projet pilote du gouvernement bruxellois visant à redistribuer leur surplus d’énergie verte aux résidents locaux sont l’école ‘Nos Bambins’ à Ganshoren et l’école Saint-Augustin à Forest.
7 Les partenaires identifiés à ce jour dans ce projet sont : Sibelga, Brugel, la Région de Bruxelles-Capitale, Sun for School, APeRE, l’école “Nos Bambins” de Ganshoren et l’école Saint-Augustin de Forest.